18Apr

COP26: advances insufficient to african countries

Samedi 13 novembre, les 196 pays qui ont négocié pendant deux semaines à Glasgow lors de la COP26 pour lutter contre le changement climatique se sont mis d’accord sur un texte final. Est-ce que ce texte contient des avancées solides pour les pays africains qui n’émettent pour l’instant que 3% des émissions de gaz à effet de serre, mais qui font partie des plus impactée par les changements climatiques ?

Avec notre envoyée spéciale à Glasgow, Anne-Cécile Bras

Sur les financements pour aider les pays à s’adapter aux conséquences du changement climatique et à développer des économies décarbonées : le texte est faible. Il mentionne les « regrets » des pays développés de ne pas avoir mobilisé les 100 milliards de dollars par an à partir de 2020 comme promis dans l’accord de Paris pour accompagner les plus vulnérables. Mais il n’y a aucune garantie ni pour les atteindre dès 2022 ni pour augmenter l’enveloppe par la suite.

Nous étions venus pour négocier un accord robuste sur les pertes et les préjudices subis. Nous voulions davantage de financements pour notre action climatique. Nous espérions du soutien pour nos situations et besoins particuliers. Nous avons supplié comme nous l’avons fait à la COP 22, à la COP23, à la COP 24, à la COP 25… Nous espérions êtres entendus, mais comme lors des rendez-vous précédents, notre plaidoyer a été rejeté.

Keriako Tobiko (ministre kenyan de l’Environnement): «Nous sommes déçus, c’est le moins que l’on puisse dire»

Déception

Échaudés par cette promesse non tenue, les pays en développement ont essayé d’obtenir des financements pour le Mécanisme des pertes et préjudices. Créé il y a huit ans, cet instrument onusien doit permettre de prendre en charge les dégâts irréparables comme les tempêtes ou la montée des eaux. Ils n’ont obtenu que la création d’une assistance technique. Seules l’Écosse, la Wallonie et l’Allemagne se sont engagées à mobiliser plus de 10 millions d’euros pour les pertes et dommages, un premier pas, mais insuffisant.

En revanche, le texte « exhorte » les pays développés à doubler leurs financements pour l’adaptation d’ici à 2025. Enfin, les États ont trouvé un accord sur l’épineux fonctionnement des marchés carbone internationaux, mais les modalités pour en bénéficier sont à surveiller.

Les mesures annoncées ne permettront pas de faire face à cette crise et surtout d’accompagner les communautés les plus affectées.

Aïssatou Diouf (Réseau action climat): «les pays développés n’ont pas été à la hauteur de l’urgence climatique»

18Apr

COP26 : the african delegations to the trouble to get to Glasgow

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Le coût très élevé des déplacements et des hébergements s’ajoute aux difficultés rencontrées pour accéder aux vaccins dans les pays en développement.

Quand elle a découvert, en septembre, le prix des hébergements à Glasgow (Ecosse), Aïssatou Diouf n’y a d’abord pas cru. Jusqu’à 700 euros la chambre, plus de 10 000 euros les quinze nuits… Des chiffres qui paraissaient insensés, mais qui ont pourtant continué de s’envoler : il faut désormais compter en moyenne 1 000 euros par jour pour se loger dans la ville où doit se tenir, du 31 octobre au 12 novembre, la 26conférence des Nations unies sur le climat (COP26). A ce tarif-là, l’événement « risque de n’être accessible qu’aux délégués et associations des pays riches », met en garde la coordinatrice sénégalaise du Réseau Action Climat d’Afrique de l’Ouest, qui regroupe une cinquantaine d’organisations environnementales.

Entre l’inflation des coûts des logements, les frais de déplacement, les visas et la difficulté d’accès aux vaccins, la COP26 s’annonce d’ores et déjà comme l’une des plus chères de l’histoire et des plus compliquées logistiquement pour les représentants des pays en développement. « A ce jour, la moitié au moins des délégués africains n’ont pas la certitude de pouvoir se rendre en Ecosse », souligne le Gabonais Tanguy Gahouma-Bekale, qui préside le groupe des négociateurs du continent. Beaucoup de délégations, habituées à se déplacer en nombre, comme celles de la Côte d’Ivoire ou de la République démocratique du Congo (RDC), vont revoir leurs effectifs à la baisse. Et la coupe devrait être encore plus sèche pour les observateurs issus de la société civile, qui ne bénéficient pas des mêmes conditions que les institutionnels.

18Apr

From women to migrants: What does a Biden win mean for Africa?

NAIROBI (Thomson Reuters Foundation) – Democrat Joe Biden’s victory in the U.S. presidential election is set to affect Africa’s 1.3 billion people on issues ranging from climate change and immigration to women’s health and human rights, according to academics and analysts.

Under the Trump administration, the United States pulled out of the landmark Paris climate accord, issued travel bans on Muslim-majority nations, and cut aid to charities providing reproductive health services that included abortion advice.

The Thomson Reuters Foundation asked activists, academics and analysts how a Biden administration could impact Africa’s 54 nations.

DAVID KODE, HEAD OF ADVOCACY, CIVICUS

“Civil society groups in Africa have observed how President Trump’s attacks on the media and his violent reprisal of Black Lives Matter protests exhibit similar tendencies of Africa’s worst authoritarian leaders.

A Biden presidency will certainly be a welcome relief for Africa as civil society will be able to count on a Biden administration to denounce African leaders who violate the rights of their people and exert pressure on them to uphold international law.

A practical way will be for the United States to re-join the U.N. Human Rights Council, which civil society holds in high esteem, but authoritarian leaders have increasingly trod on over the last four years.”

NIGEL TRICKS, EAST AFRICA DIRECTOR, NORWEGIAN REFUGEE COUNCIL

“The new U.S. government should prioritise efforts in leading global action to protect millions of people seeking refuge, particularly from those African countries ridden by deadly conflict or the devastation of a changing climate.

As African countries continue to take up more than their fair share of the global duty in welcoming women, children, and men fleeing their homes, the wider international community – led by the United States – has not matched their efforts.

We would like to see the U.S. government taking a lead in ensuring these host countries have the necessary financial support to ease the load of hosting many millions of refugees, as well as the political engagement that can lead to more durable solutions that help people rebuild their lives.”

VICTOR RASUGU, EXECUTIVE DIRECTOR, NETWORK FOR ADOLESCENT AND YOUTH OF AFRICA

“The United States is the single largest family planning donor in the world and thus plays a major role in reproductive health care in Kenya.

Trump’s (so-called) global gag rule was and continues to be an onslaught on the reproductive health and rights of women. The decision deprived individuals, especially women of reproductive age, of the right to body autonomy.

A win for Joe Biden brings back hope and sanity in the management of the healthcare systems … Countries like Kenya will once again be free to offer the reproductive health continuum of care to its populace without being whipped into a certain policy direction that they are not party to.”

AISSATOU DIOUF, WEST AFRICA COORDINATOR, CLIMATE ACTION NETWORK

“The Trump administration has refused to act to mitigate the effects of climate change, and has blocked international climate negotiations for ambitious climate action.

Donald Trump’s decision to withhold $2 billion of the $3 billion pledged by his predecessor has contributed to a huge shortfall at the Green Climate Fund – a contribution that would have enabled countries most affected by climate change, such as African countries, to implement policies to strengthen the resilience of their frontline communities.

A Biden administration would need to take the lead on climate change and make climate change a global priority. We expect the United States would rejoin the Paris Agreement, and step up its efforts and also contribute to the Green Climate Fund.”

ISA SANUSI, SPOKESMAN, AMNESTY INTERNATIONAL

“President Donald Trump’s expansion of the immigrant visa ban that includes Nigeria and other countries with vulnerable populations fleeing persecution was unacceptable.

The ban is discriminatory – and with it the United States is setting a dangerous precedent. It has closed the door for people fleeing persecution and also for those who are seeking new opportunities.

Applying the ban on people from select countries, some of them facing crisis, is contrary to the values of the United States.

It is our hope that all these discriminatory measures will be removed and more migrant friendly policies will be introduced.”

18Apr

Qu’attend l’Afrique de la COP26 ?

L’Afrique peut-elle peser dans les négociations climatiques ? D’ailleurs, que peuvent attendre les pays africains de la COP26 qui se tiendra début novembre 2021 ? Cette Cop suscite de l’espoir. Elle doit trouver un accord pour réaliser les objectifs de l’Accord de Paris. Le but est d’empêcher l’augmentation de la température terrestre au-delà de 2 degrés en demandant aux Etats participants de limiter puis réduire leurs émissions de gaz à effet de serre. Mais, pour l’Afrique, région très exposée aux risques climatiques mais peu émettrice, les enjeux vont bien au-delà de l’atténuation du réchauffement et concernent le développement.

L’écart entre poids démographique et poids climatique de l’Afrique : 17 % de la population mondiale, 4 % des émissions mondiales

L’Afrique compte 1,3 milliard d’habitants, soit 17 % de la population mondiale, mais leur empreinte carbone individuelle s’avère plus faible que la moyenne mondiale. Le continent africain est responsable de moins de 4 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Pourtant, il se montre directement confronté à l’impact des changements climatiques : sécheresses, inondations auxquels il faut ajouter les risques pour la sécurité alimentaire ou sanitaire des populations. Autant de facteurs de déstabilisation des équilibres régionaux qui peuvent conduire à d’importants déplacements de population.

Alors que peut attendre l’Afrique de la Cop26 ? Quels sont les enjeux pour cette région du monde ?

Quels enjeux pour l’Afrique à l’approche de la Cop26 ?

« L’Afrique mériterait plus d’attention des autres parties du monde. » soutient Mathieu Mérino, enseignant chercheur à l’IRIS (institut des relations internationales et stratégiques) et spécialiste des questions environnementales. « Le continent est particulièrement menacé et vulnérable face aux changements climatiques et les conséquences sont graves : insécurité alimentaire, pénurie d’eau, déplacement de populations… Ces paramètres alimentent un contexte déjà conflictuel dans certaines zones, le facteur climat risque d’exacerber les conflits déjà présents. »

[ à lire également : Mathieu Merino : « Si l’Afrique se met à vraiment polluer, on sera victimes aussi de leurs émissions de gaz à effet de serre »]

Aissatou Diouf, responsable des politiques internationales et du plaidoyer chez Enda et coordinatrice de Climate Action Network en Afrique de l’Ouest estime que des actions concrètes sont espérées pour lutter contre le réchauffement climatique. Elle donne l’exemple de son pays, le Sénégal, dont les côtes sont ravagées par l’érosion. « On voit que des villages sont détruits », dit-elle. « Les communautés sont déjà affectées par le changement climatique et il urge de renforcer leur résilience. »

Des priorités compromises

Difficile de se concentrer sur les enjeux environnementaux de long terme lorsque la première des priorités reste la survie. « L’Afrique doit espérer un meilleur investissement de la classe politique africaine qui se désintéresse des COP et des questions environnementales. C’est dommage, mais ce n’est pas une priorité pour les dirigeants africains car ils sont d’abord confrontés à des questions de survie de leurs populations. Les enjeux climatiques sont donc plus éloignés que les questions sécuritaires par exemple », souligne Mathieu Merino.

L’Afrique peut-elle parler d’une voix ?

L’Afrique est un continent pluriel avec 54 pays, de multiples cultures et réalités environnementales. Si l’Union Européenne parvient à surmonter une partie de ses différences pour parler d’une voix unie pour ses 26 états-membres aux négociations climatiques, ce n’est, pour le moment, pas le cas de l’Afrique. Ainsi, mettre en avant l’Afrique en tant qu’entité parait compliqué lorsque certains pays restent très dépendants des énergies fossiles comme l’Afrique du sud ou le Nigéria et que d’autres le sont beaucoup moins comme le Kenya. Sans parler de ceux pour lesquels l’accès à l’énergie reste compliqué ou d’autres confrontés au stress hydrique ou à la désertification. Sébastien Treyer, directeur de l’IDDRI dit que l’Afrique cherche à se présenter telle une entité. « …et elle s’organise pour l’être, malgré l’hétérogénéité des situations nationales et sous régionales. » dit-il. Mathieu Merino se montre plus circonspect sur la capacité de l’Afrique à parler d’une même voix : « Il n’existe pas de panafricanisme à proprement parler pour les questions environnementales. Il n’y a pas vraiment d’unité avec une feuille de route pour les enjeux climatiques pour le continent. »

Malgré les disparités, le continent semble s’accorder sur les mêmes ambitions quant à la transition énergétique et la diminution des émissions de gaz à effet de serre. « Oui l’Afrique c’est plusieurs dynamiques, mais nous avons réussi à fédérer nos ambitions pour le groupe Afrique et c’est important de le dire, le groupe Afrique prend en compte les besoins et priorités de chaque état qui ne sont pas les mêmes, il faut souligner le fait que nous ne sommes plus dispersés et on est plus cohérents. » souligne Aissatou Diouf. « Beaucoup de pays ont ratifié pour réduire les GES, participer à l’échange global de la lutte contre le réchauffement…C’est un point de convergence entre chaque pays africain. »

L’accent est mis sur la part du renouvelable dans le mix énergétique. « Même pour les pays avec une rente sur les énergies fossiles comme le Nigéria, leur question est la diversification de leur économie, la transformation structurelle et l’industrialisation, et qu’on l’aide à faire cela de manière décarbonée. » dit Sébastien Treyer.

Toutefois, l’unification totale du continent pour les questions environnementales semble difficile. En effet, Mathieu Merino rappelle que « Tant qu’il n’y aura pas un leader charismatique africain pour porter ces questions environnementales à l’échelle internationale, faire tendre la voix de l’Afrique va être compliqué. Il s’agit de diplomatie, c’est-à-dire de rechercher des consensus et de marchander. Or, sans personne qui s’empare clairement de ces questions, c’est difficile d’imaginer peser dans les négociations. »

Des financements attendus

« Le coût de l’adaptation climatique est très élevé pour le continent et ça va s’accentuer dans le futur. Il faut mettre en place le fonds vert pour assurer une transition écologique. » rappelle Mathieu Merino. Lors de l’Accord de Paris, des fonds avaient été dédiés à l’aide au développement et à l’adaptation climatique aux pays du sud. Il était question d’une aide de 100 milliards de dollars. Mais à l’heure actuelle, ces fonds se sont élevés à 80 milliards de dollars. Aissatou Diouf souligne que ces engagements doivent être respectés, « Il est urgent de faciliter l’accès à l’adaptation. » Cette question pourrait être un frein dans les négociations à venir, mais de nombreux observateurs ont bon espoir que les 20 milliards manquants soient trouvés à Glasgow. Mais, à cette question du financement de l’adaptation pourraient s’ajouter deux autres sujets épineux : celui dit des pertes et préjudices qui correspond à d’éventuelles réparations et compensation des pays pollueurs vers les pays affectés par le réchauffement et celle de la nature même des aides attribués par le fonds vert qui sont en grande partie des emprunts dont le remboursement pèse sur les économies des pays les plus fragiles.

18Apr

Une jeunesse africaine sur le front du climat

Dans les pas de la Suédoise Greta Thunberg, une nouvelle génération de militants émerge sur le continent. Elle réclame des actes à la hauteur des menaces qui pèsent sur son avenir.

L’histoire avait mal commencé. Ejectée d’une photo recadrée – par nécessité artistique, dira le photographe de l’agence Associated Press – de militants blancs pro-climat au Forum économique de Davos, en janvier 2020, l’Ougandaise Vanessa Nakate aurait pu ne rien dire. Les mois qui ont suivi ont au contraire montré qu’elle ne se laisserait pas « effacer ». Elle, et l’Afrique, dont elle veut faire entendre la voix. Fin octobre, elle a publié son premier livre, Une écologie sans frontières (Harper Collins, 256 pages, 18 euros), dont le titre original, A Bigger Picture (« une photo plus large »), est un clin d’œil à sa mésaventure helvète.

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Ses slogans ciselés pour interpeller les pays pollueurs comme les dirigeants des pays du Sud tentés par un développement fondé sur les énergies fossiles sont désormais célèbres, comme les fameux « on ne mange pas de charbon et on ne boit pas de pétrole ». Quelques semaines avant la COP26 de Glasgow, elle a apporté son soutien aux militants allemands qui font le siège du village de Lützerath (Rhénanie-Palatinat), dans l’ouest du pays, pour dénoncer l’exploitation d’une mine de charbon à ciel ouvert contraire à l’accord sur le climat de Paris de 2015 et son objectif de contenir la hausse moyenne des températures en dessous de 1,5 °C.

Prendre part à la conversation mondiale

La Suédoise Greta Thunberg et son initiative Fridays for Future (« Des vendredis pour l’avenir ») sont à l’origine de l’engagement de Vanessa Nakate comme de milliers d’autres jeunes Africains à travers le continent. Le mouvement, né en 2018 et formellement présent dans dix-sept pays, leur permet de prendre part à la conversation mondiale sur la crise écologique. Ils réclament une transition climatique juste : leur continent, qui, historiquement, a le moins contribué à l’accumulation des gaz à effet de serre dans l’atmosphère, ne doit pas être celui qui en paie le prix le plus élevé.

Les images des grèves scolaires du vendredi sont postées sur les réseaux sociaux où les militants – souvent des filles – font circuler l’information scientifique qui justifie leur anxiété. Les mises en garde du sixième rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) ont autant résonné à Dakar et Luanda qu’à New York ou Tokyo. Sur leurs fils Facebook, Twitter ou Instagram, les dramatiques inondations dans la vallée de la Roya en France l’année dernière, celles survenues dans l’ouest de l’Allemagne cet étéles mégafeux en Australie et en Californie, les ouragans de Floride… offrent le spectacle des pays riches rattrapés par la multiplication des catastrophes naturelles et font écho à l’actualité de leur propre pays. A la différence – de taille – qu’ici, les populations ne disposent d’aucun filet de sécurité lorsqu’elles ont tout perdu. En 2020, plus d’un quart des Africains ont été affectés par un épisode de sécheresse, des inondations, un cyclone… selon le bureau des Nations unies pour la réduction des risques naturels. Des millions de personnes ont dû abandonner leur village.

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« Je veux que nos dirigeants aient mal à la tête à force de nous entendre crier pour qu’ils agissent contre le dérèglement climatique », Bob Matovu, de Fridays for Future Ouganda

La notoriété de ces étudiants engagés reste cependant plus grande à l’étranger, au sein de cette jeunesse cosmopolite et connectée, que chez eux. Certains gouvernements apprécient peu ces sit-in pendant lesquels leurs choix sont contestés sans aucune préséance. En Ouganda, le phénomène Vanessa Nakate s’accompagne d’une violente répression. Arrestations, intimidations, confiscation des téléphones portables… Si la tolérance était de mise lorsqu’il s’agissait d’interpeller sur la pollution plastique du lac Victoria ou sur l’air vicié de la capitale par les milliers de voitures et de mototaxis roulant au diesel, elle disparaît lorsque le gigantesque projet d’exploitation pétrolière porté par la société française Total est dénoncé.

La campagne Stop EACOP, du nom de l’oléoduc de plus de 1 400 km qui traversera l’Ouganda et la Tanzanie pour acheminer le combustible jusqu’aux tankers du port de Tanga, sur l’océan Indien, est considérée comme un acte antigouvernemental et antidéveloppement par le président ougandais, Yoweri Museveni, trente-cinq ans au pouvoir. « Nous n’allons pas nous arrêter, car on nous vole notre avenir. Je veux que nos dirigeants aient mal à la tête à force de nous entendre crier pour qu’ils agissent contre le dérèglement climatique », clame néanmoins Bob Matovu, 21 ans, un des fondateurs de Fridays for Future Ouganda. Le jeune homme s’est posté à plusieurs reprises devant le Parlement de Kampala avec une pancarte résumant ses attentes en toutes lettres. Le dimanche, il manifeste à la sortie des églises avec les mêmes messages d’alerte.

Des promesses non tenues

L’arrivée de cette nouvelle génération sur le devant de la scène a remis du baume au cœur des militants plus aguerris et parfois guettés par le découragement. « Face à des négociations internationales qui s’enlisent, des gouvernements passifs, la mobilisation de ces jeunes apporte de l’espoir pour les luttes futures. Nous avons besoin d’eux. Ils osent des modes d’action plus créatifs », témoigne Landry Ninteretse, coordinateur du mouvement 350.org pour l’Afrique. Cette organisation mondiale luttant contre la poursuite de l’exploitation des énergies fossiles a été lancée aux Etats-Unis il y a une dizaine d’années et s’implante progressivement sur tous les continents. Trois bureaux ouverts à Cotonou, Johannesburg et Nairobi assurent le relais en Afrique. Le nom de l’ONG fait référence au seuil de 350 parties par million (ppm) de concentration de CO2 dans l’atmosphère, défini comme dangereux par les scientifiques. La concentration dans le monde s’est établie à un niveau record de 413 ppm en 2020, selon les chiffres publiés le 25 octobre par l’Organisation météorologique mondiale.

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Dans la ligne de mire de ces militants réunis sous la bannière « Keep it in the ground » (« laissez-les sous terre »), plusieurs grands programmes d’infrastructures jugés climaticides, comme la centrale à charbon de San Pedro en Côte d’Ivoire ou celle de Sengwa au Zimbabwe. M. Ninteretse veut cependant croire que les déclarations du président chinois, Xi Jinping, en septembre devant l’assemblée générale des Nations unies annoncent de futures victoires : la Chine, principal créancier du continent, s’est engagée à ne plus financer de nouvelles centrales à charbon à l’étranger.

« Les jeunes expriment leur colère avec radicalité et ils ont raison car c’est leur avenir qu’ils voient compromis », Aïssatou Diouf, de l’ONG Enda

Marathonienne chevronnée des négociations onusiennes, la Sénégalaise Aïssatou Diouf, responsable du plaidoyer climat-énergie de l’ONG Enda (Environnement, développement, action), observe aussi l’engagement croissant de cette génération qui, après avoir cru aux promesses de l’accord de Paris, constate à regret qu’elles ne sont pas tenues. « Entre les discours et les actes, l’écart est trop grand. Les pays industrialisés ont une responsabilité dans le dérèglement climatique qu’ils n’assument pas. Leurs efforts pour réduire les émissions de gaz à effet de serre sont insuffisants et la solidarité financière promise aux pays du Sud n’est pas là. Les jeunes expriment leur colère avec radicalité et ils ont raison car c’est leur avenir qu’ils voient compromis », approuve-t-elle. Tout en jugeant leur démarche « complémentaire » des pressions plus « diplomatiques » exercées par son organisation pour faire avancer les négociations. Enda est membre de Climate Action Network (Réseau action climat en France), un réseau mondial de 1 500 organisations dans lequel tous les pays africains sont représentés, à l’exception de quelques-uns comme le Gabon ou la Centrafrique.

Partout dans le monde, la jeunesse manifeste pour exiger que lui soit transmise « une planète en bon état ». En Afrique, cette génération des moins de 20 ans représente la moitié de la population. Les conditions dans lesquelles elle doit se construire un avenir sont déjà parmi les plus difficiles et les plus inégalitaires. Le dérèglement climatique ajoute sur ses épaules un fardeau qu’elle peut à juste titre estimer de « trop ». « L’augmentation de 1 °C des températures moyennes à l’échelle de la planète a déjà eu des conséquences sévères pour l’Afrique subsaharienne. Un réchauffement de 3 °C à 4 °C serait désastreux », alertait le Centre mondial sur l’adaptation au changement climatique dans son rapport de 2020. C’est ce que ne manqueront pas de rappeler les jeunes Africains à Glasgow – même sous-représentés, en raison des contraintes sanitaires ou du coût exorbitant du déplacement.

18Apr

COP26: les dirigeants africains vont rappeler aux pays riches leurs promesses au continent

Une vingtaine de chefs d’État africains s’est déplacée à Glasgow pour la 26e conférence des parties sur le climat (COP26). Ils s’exprimeront, comme tous les autres dirigeants présents, lundi 1er et mardi 2 novembre au cours du sommet, prélude aux négociations. Et ils devraient exprimer les principales revendications de la délégation africaine, en particulier que se concrétise l’aide promise depuis dix ans à l’Afrique pour qu’elle s’adapte au changement climatique.

Les présidents Félix Tshisekedi (République démocratique du Congo), Mohamed Bazoum (Niger), Denis Sassou-Nguesso (Congo-Brazzaville), Ali Bongo (Gabon), Andry Rajoelina (Madagascar), Muhammadu Buhari (Nigeria), Abdel Fattah al-Sissi (Égypte), Nana Akufo-Addo (Ghana), George Weah (Liberia), Uhuru Kenyatta (Kenya)… En tout, une vingtaine de chefs d’État et une trentaine de ministres ont fait le déplacement de Glasgow pour cette COP26 cruciale. Ils auront trois minutes chacun pour porter la voix de l’Afrique. Et pour exprimer d’abord son impatience.

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L’Afrique n’a reçu que 70% à 80% des 100 milliards de dollars par an promis pour 2020 par les pays riches pour lui permettre de s’adapter aux événements météorologiques extrêmes de plus en plus fréquents qu’elle subit, à cause d’un réchauffement climatique qu’elle n’a pas créé. Ce montant, par ailleurs largement composé de prêts et non de dons, pourrait n’être atteint qu’en 2023, et il est jugé largement insuffisant.

« Ces engagements ont été pris il y a plus d’une dizaine d’années. Chaque année, les pays développés repoussent l’échéance à l’année suivante. (…) C’est une aberration. Ces 100 milliards de dollars ne sont, pour nous, qu’un point de départ, un plancher, et non un point d’arrivée. (…) Ils sont loin d’être suffisants pour faire face à cette crise climatique. »

COP26 : « Ces 100 milliards de dollars sont loin d’être suffisants », prévient Aïssatou Diouf

Les États africains refusent, par ailleurs, de renoncer au développement économique. Leur discours mettra donc en avant leur besoin de compensation pour service environnemental rendu, si on leur demande de ne plus exploiter leurs forêts ou leurs gisements d’hydrocarbures, afin d’atténuer le réchauffement climatique mondial.

« L’Afrique est responsable de 4% des émissions globales et elle est le continent le plus vulnérable. L’Afrique a besoin de ces moyens financiers pour lutter contre le changement climatique. »

18Apr

Crise climatique en Afrique : « On ne peut pas continuer à faire le tour du monde pour récolter aussi peu de financement », s’insurge l’activiste sénégalaise Aïssatou Diouf

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Aïssatou Diouf est responsable des politiques internationales et du plaidoyer au sein de l’ONG Enda Energie basée à Dakar, au Sénégal. Coordinatrice du Climate Action Network (Réseau Action Climat), en Afrique de l’Ouest et du Centre, elle arpente depuis près d’une décennie les couloirs des négociations climat. Retour sur la COP26.

Franceinfo Afrique : quels étaient, pour les Etats africains, les principaux enjeux de cette COP26 ?

Aïssatou Diouf : d’abord, réduire le réchauffement climatique sur une trajectoire de 2 à 1,5°C comme stipulé dans l’Accord de Paris. Ce qui est déjà problématique pour le continent puisqu’on voit déjà les sécheresses et les conséquences sur l’agriculture… Ensuite, concernant l’adaptation dans les pays en développement et les pertes et dommages, la question du financement est un enjeu prioritaire. C’est mon troisième point, mais c’était au cœur des négociations : les mécanismes de marchés carbone. C’est l’article 6 de l’Accord de Paris et on n’avait pas encore trouvé d’accord pour les règles de mise en œuvre et d’opérationnalisation. Tous ces enjeux concernent les Etats. Pour ce qui est des organisations de la société civile, l’enjeu était de mettre l’humain au centre des discussions parce que des communautés sont de plus en plus vulnérables et des vies sont en jeu.

Au final, pour les Africains, il y a donc eu très peu d’avancées à Glasgow si l’on s’en tient à la trajectoire et à la question du financement. Les 100 milliards pour l’adaptation ne sont toujours pas réunis…

Quelques jours avant la COP de Glasgow, la feuille de route publiée indiquait que les 100 milliards de dollars, promis à Copenhague, seraient atteints en 2023. C’était déjà problématique pour les pays en développement d’aller à Glasgow sur la base d’une promesse non tenue, puisque cette somme aurait dû être réunie en 2020. Il y a donc déjà un décalage de trois ans. Ce qui est énorme quand on lutte contre les effets du changement climatique. Tout cela montre qu’il n’y a pas de détermination. Il y a toujours une excuse quand il s’agit de trouver une solution à cette crise climatique qui touche les pays en développement alors que les nations les plus riches savent trouver l’argent quand elles le veulent. Dernier exemple avec la crise sanitaire liée au Covid-19.

Néanmoins, il y a quelques progrès. Par exemple, sur l’adaptation qui est aujourd’hui sous-financée. L’objectif de l’accord de Paris était d’équilibrer le financement climat : 50% pour l’atténuation et l’autre moitié pour l’adaptation. A Glasgow, il y a un engagement à doubler les financements sur l’adaptation d’ici 2025, soit 40 milliards de dollars. Ce qui fait 10 milliards de moins quand la base de calcul correspond aux fameux 100 milliards de dollars. C’est loin de satisfaire les besoins de pays en développement, mais cela reste une avancée notable.

Pas d’accord non plus sur les pertes et dommages…

Les pays africains et les petits Etats insulaires ont réussi à imposer la question des pertes et dommages comme un sujet politique à la COP26. C’est pour moi le fruit de la bataille des organisations de la société civile et des pays en développement. Par contre, ne pas mettre en place un mécanisme financier comme l’a proposé le G77 et la Chine pour ce qui est des pertes et dommages est regrettable. Résultat : l’action climatique est en train d’être retardée et on met davantage la vie de millions de personnes en danger. Cependant, la reconnaissance politique sur les pertes et dommages constitue une avancée. L’Ecosse et la Wallonie ont mis de l’argent, c’est incitatif. A noter que sur les pertes et dommages, un dialogue sur deux ans va avoir lieu à partir de 2022, mais il n’y a pas de garantie qu’un mécanisme sera mis en place au terme de ces négociations bien que les pays en développement comptent pousser dans ce sens. Au total, il faut davantage de financements pour l’adaptation et les pertes et dommages pour enfin enclencher cette transition écologique que nos Etats sont incapables de faire aujourd’hui. On ne peut pas continuer à faire le tour du monde pour récolter aussi peu de financement.

Ne serait-il pas temps que les pays africains, au lieu d’attendre l’argent promis, trouvent eux-mêmes le moyen de financer l’action climatique ?

Nos Etats se mobilisent déjà. Une partie considérable de leur PIB est utilisée pour faire face aux conséquences du changement climatique. La justice climatique est au centre de toute cette discussion que nous avons aujourd’hui. Par conséquent, la première question que l’on devrait se poser est la suivante : qui paye ? La réponse est assez simple : ce sont les responsables qui doivent payer. D’autant plus qu’en matière d’engagements, les pays africains jouent le jeu depuis le début. S’aligner sur une trajectoire de développement climato-compatible, c’est un coût additionnel au développement et nos Etats ne peuvent pas assumer cette charge supplémentaire. Les pays les plus riches doivent tenir leurs engagements et renforcer la mobilisation des financements. Tout le monde parle des 100 milliards comme si cette somme allait résoudre la question climatique en Afrique. Ce n’est pas vrai ! A cela, il faut ajouter que seuls 30-35% des financements mobilisés pour lutter contre le changement climatique atteignent le continent africain.

On a senti beaucoup de déception à propos de cette COP chez tous ceux qui se mobilisent depuis des années pour que les Etats prennent les bonnes décisions. Qu’en pensez-vous ?

Les gens commencent à en avoir assez du statu quo. Le Royaume-Uni a tout fait pour organiser cette COP en présentiel en dépit de la pandémie. Par conséquent, on attendait un leadership réel pour tirer les Etats vers plus d’ambition. Nous n’avons rien vu. En matière d’inclusivité, le compte n’y était pas non plus. C’était très difficile pour les organisations de la société civile d’assister aux négociations et d’être présents quand les chefs d’Etat et de gouvernement l’étaient. A ce propos, les gens en ont également marre d’entendre des responsables politiques déclarer qu’ils sont conscients du dérèglement climatique et que cela ne se traduise pas dans les salles de négociation. On voit les négociateurs de ces mêmes pays ne faire aucun effort. Par contre, la COP26 fait partie des COP les plus suivies. Les ONG appellent cela le « people power » (le pouvoir de l’opinion publique). Tous les citoyens qui étaient dans les rues à Glasgow et partout dans le monde ne veulent plus laisser prospérer ce statu quo.

Peut-on conclure que si l’action climatique ne décolle pas, c’est du fait des pays développés qui, en ne mettant pas les financements nécessaires à disposition, renient leur responsabilité historique ?

Ils refusent de prendre leurs responsabilités et diluent tout le discours sur « la responsabilité commune mais différenciée » en pointant les pays émergents comme l’Inde par exemple. Nous sommes d’accord que ces pays doivent faire des efforts et sortir progressivement des énergies fossiles et notamment le charbon. Mais qu’ont fait les pays développés depuis ? Les Etats historiquement responsables de ce réchauffement climatique ne sont pas en train de prendre leurs responsabilités.

Quelle serait la solution pour que les pays africains pèsent davantage dans les négociations climat ?

Il nous faudrait certainement une meilleure coordination entre les groupes où beaucoup de pays en développement sont présents, à savoir celui des Pays les moins avancés (PMA), le G77+Chine et le groupe Afrique. Ensuite, la Conférence des ministres africains de l’Environnement devrait soutenir davantage les négociateurs sur des questions complexes. Si les négociateurs n’arrivent pas à les régler, il faut qu’elles remontent à l’échelon ministériel surtout dans la perspective de la prochaine COP qui se tiendra en terre africaine, au Caire, en Egypte. On espère que les attentes des plus vulnérables seront enfin prises en compte et qu’il y aura un leadership fort des pays africains afin que les négociations délivrent des résultats à la hauteur de l’urgence climatique. On a beau critiquer la COP, mais c’est le seul processus que l’on a qui permet à la Gambie, aux Etats-Unis, à la France et au Sénégal d’être réunis autour de la même table.

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